La Bolivie et ses Alasitas

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Si vous rencontriez un génie, que lui demanderiez-vous ? S’il vous disait que vous pouvez avoir tout ce que vous désirez, lui demanderiez-vous une nouvelle voiture ? Un ordinateur dernier cri ? Des vacances dans la destination de vos rêves ? En Bolivie, pour rêver grand, il faut penser petit.

Les alasitas sont des objets miniatures qui revêtent la forme de tout ce que vous désirez : une grande maison, un alléchant gâteau au chocolat ou un joli bouquet de fleurs, ou encore le dernier smartphone. Chaque année, en janvier, un festival a lieu à La Paz, où sont exposées des versions miniatures d’à peu près tout. Dans les rues et les parcs de la ville, les gens achètent et vendent des versions miniatures de meubles, d’outils, de nourriture ou de tout ce qu’ils ont ajouté sur leur liste de souhaits, et même des liasses de faux billets achetés avec de vrais billets de banque (en taille réelle, eux) !

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source : CiudadesCC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons

 

Les artisans exposent tout et n’importe quoi lors de ce festival, qui commence le 24 janvier et dure un mois entier. Certaines miniatures ont été fabriquées délicatement, avec un grand souci du détail, tandis que d’autres sont simplement des jouets imitant de vrais objets. Les acheteurs potentiels scrutent les objets pour trouver celui qui reflète le mieux leurs désirs les plus profonds. Les visiteurs affluent à La Paz pour prendre part aux festivités.

Cette tradition ancestrale remonte à l’époque pré-inca et précolombienne. Le peuple Tiwanaku priait pour avoir de la chance et échangeait des cadeaux, offrant des versions miniatures de ce qu’il espérait obtenir ou réaliser. Les Aymara sont les descendants actuels des Tiwanaku, habitants indigènes des régions des Andes et de l’Altiplano en Amérique du Sud, dont plus de la moitié de la population vit en Bolivie.

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Site archéologique de Tiwanaku - source : canva

 

Leur système de croyances contient encore des éléments de ses anciennes racines, ainsi que des influences catholiques.

En aymara, « alasitas » veut dire « achète-moi ». Il y a longtemps, les objets offerts étaient des pierres colorées ou des produits agricoles, le souhait étant d’obtenir une bonne récolte. Au cours des derniers siècles, cette fête a intégré d’autres pratiques religieuses, comme la gratitude envers la Vierge Marie, ou « Notre-Dame de la Paix », qui a donné son nom à La Paz.

Mais Ekeko, le dieu aymara de l’abondance, est toujours la principale divinité honorée pendant le festival des Alasitas. En effet, vous verrez de nombreuses représentations miniatures d’Ekeko pendant le festival, mais aussi dans les foyers boliviens tout au long de l’année. Avec son gros ventre et ses vêtements bariolés, il est généralement doté d’un espace dans sa bouche pour y placer une cigarette. Symbole de joie et d’abondance, la figurine Ekeko est également censée éloigner la malchance. Les miniatures des objets souhaités sont données à la poupée Ekeko pour qu’elle puisse exaucer ces souhaits, ainsi que des offrandes régulières d’alcool et des prières pour qu’elle reste d’humeur à les exaucer.

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Miniature du dieu de l'abondance, Ekeko - source : Photo de ui-martin sur Unsplash

 

Après avoir acheté la miniature de l’objet souhaité, elle est bénie par un chaman, un yatiri, dans un nuage d’encens. Il est intéressant de noter que cette tradition est souvent exécutée sur les marches d’une église, où l’on fait des offrandes d’alcool à la Pachamama, la Terre Mère. Autre exemple du mélange des traditions : à midi, le premier jour du festival, l’Église catholique se joint à la fête en offrant des bénédictions à la cathédrale de La Paz. Une foule immense se rassemble, tenant en l’air leurs rêves miniatures, et les prêtres aspergent la foule d’eau bénite afin de bénir autant de souhaits que possible en même temps.

 

Attention toutefois : le festival des Alasitas ne se résume pas au consumérisme et à la satisfaction de ses propres désirs égoïstes ! Depuis sa création, il s’agit d’un rituel de réciprocité, et bon nombre des objets miniatures achetés par les habitants de la ville sont des objets de luxe. Ce sens de l’échange avec les amis, la famille et même les inconnus est une pierre angulaire de la culture andine, à telle enseigne que, depuis 2017, le festival des Alasitas est classé au patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’Unesco. Selon cette dernière organisation, cette pratique « favorise la cohésion sociale et la transmission intergénérationnelle et améliore les relations intrafamiliales. » Elle souligne également que les concours organisés dans tout le pays contribuent à stimuler la créativité, et que les musées sensibilisent le public aux thèmes exprimés par les miniatures.

 

Même si vous ne croyez pas en Ekeko et en sa capacité à faire de la magie, il est fascinant d’observer le niveau de détail et d’artisanat de cette toute petite version du monde. Des versions minuscules du journal quotidien sont même imprimées, avec des histoires drôles sur les sujets du jour, ou des détails sur les escapades d’Ekeko.

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Ekeko - sources : HachikouCC BY-SA 3.0 / david.unruheCC BY-SA 2.0, via Wikimedia Commons

 

Et vous, quelles miniatures achèteriez-vous ? Au festival des Alasitas, votre imagination est la seule limite. Mais si votre souhait a un lien avec l’Amérique du Sud, vous pouvez compter sur nous pour vous aider ! Apprenez en plus sur nos voyages en Bolivie, et au-delà, et réciter une prière à Ekeko.

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